OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Mesure ta pollution http://owni.fr/2012/11/26/mesure-ta-pollution/ http://owni.fr/2012/11/26/mesure-ta-pollution/#comments Mon, 26 Nov 2012 12:06:38 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=126646

Citoyens capteurs - Photo CC bync Pierre Metivier

À peine arrivé à la table matinale de ce café parisien, Gabriel Dulac sort son tournevis pour offrir au regard le contenu du capteur citoyen de qualité de l’air. À l’intérieur de cette espèce de boîtier gris EDF, gros comme une boîte à sucre, le strict minimum vital : un mini ordinateur, deux capteurs, une batterie et une clef 3G pour transmettre les données. Le tout en “full open hardware”, terme que répète avec méthode Olivier Blondeau, docteur à Sciences Po : “présenter l’objet ouvert fait partie de notre démarche”. Né de la rencontre de ce duo de Labo citoyen et de l’association Respire, le projet Citoyens capteurs vise à rendre abordable pour 200 euros un système fiable de relevé de la qualité de l’air, avec plans et données en format open source.

L’idée de mesures à l’échelle citoyenne n’est pas inédite. Avec la catastrophe de Fukushima, la nécessité d’un réseau de capteurs complémentaire de celui des pouvoirs publics (dépassés par les besoins d’information sur l’étendue des dégâts radiologiques) a amené à la constitution de toute une infrastructure associative de recueil des taux de radioactivité, le réseau Safecast. Une idée qui avait déjà été celle de la Criirad en France et pour le même indicateur.

Expertise

Lancé sur le champ de la mesure de qualité de l’air, Labo citoyen et Respire ont également pu s’inspirer d’autres initiatives ayant défriché le terrain des capteurs à bas coût et de la mise à disposition de données, comme AirQualityEgg.

Mais si la mesure de radioactivité ne nécessite que le recueil d’une variable (le nombre de désintégrations de noyaux radioactifs, exprimé en Becquerel), celle de la qualité de l’air porte sur une quantité de composantes : ozone (O3), particules fines et dioxyde d’azote, pour ne citer que les seuils clés. Or, pour rendre les données recueillies comparables à celles des organismes reconnus, le capteur citoyen de qualité de l’air se devait de répondre aux normes admises et donc d’aligner une haute qualité de mesure. Une expertise disponible uniquement chez les organismes eux-mêmes, ce qui a amené Gabriel à discuter directement avec AirParif :

En deux heures de discussion, nous avons gagné cinq mois d’expertise. Au départ, nous mesurions les microparticules en volume, sauf que le seuil est en poids et que la densité peut varier du tout au tout au moindre changement de température.

Si AirParif refuse l’idée d’un “label”, l’association agréée de mesure de qualité de l’air parisien a ouvert ses labos aux prototypes de capteurs citoyens, suivant une démarche détaillée par sa directrice de la communication Karine Léger :

Cette initiative s’inscrit pour nous dans la continuité de notre mission : en complément de notre réseau de soixante capteurs en Île-de-France, placés dans des zones représentatives, nous souhaitons obtenir des mesures dans les zones d’exposition des gens. Depuis 2006, nous avons déjà fait des tests dans les habitacles des automobiles, dans les transports en commun (ou avec des tubes tests) sur des citoyens volontaires tout au long de la journée. À chaque fois, il s’agissait de versions réduites de nos capteurs principaux. Nous opérons un échange d’expertise scientifique sur les capteurs citoyens afin qu’ils puissent produire des données qui complètent les nôtres.

En pratique, les capteurs d’AirParif sont disposés dans des endroits représentatifs, permettant d’élargir la mesure par des outils de modélisation. Carrefour d’Alésia, dans le XIVe arrondissement, un capteur mesure ainsi les émission sur un “grand rond-point congestionné de Paris” tandis que, le long du boulevard périphérique, deux points de mesure évaluent la qualité de l’air à la frontière de la capitale.

Anti-Linky

La démarche des citoyens capteurs n’est cependant pas strictement scientifique. Derrière le concept de “full open hardware”, le projet tout entier s’inscrit dans une logique d’ouverture à la réappropriation et à la contribution citoyenne : chaque pièce (du mini ordinateur Rapsberry Pi aux outils de mesure) est listé sur le wiki [en], le code de la base de données recueillant les mesures est disponible sur le réseau social Github… Et le tout en licence ouverte et réutilisable. Une démarche d’ouverture totale du dispositif que Labo citoyen et Respire souhaitent accompagner mêlant formation technique, exposé médical sur les dangers de la pollution atmosphérique et initiation à la chimie de l’air urbain.

Nous sommes dans l’anti-Linky, ironise Olivier Blondeau. EDF nous propose un boîtier fermé, dans lequel personne ne sait ce qu’il y a et qui communique des informations qui vous concernent mais uniquement à EDF. Là, tout est ouvert et disponible pour l’amélioration et la réappropriation.

L’interprétation même des données est laissée à l’imagination et aux besoins des utilisateurs. Chercheuse à l’université Paris-III en Sciences de la communication et associée au projet, Laurence Allard inscrit cette démarche dans une réappropriation politique de l’objet à rebours du transhumanisme :

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Chacun peut mettre en scène les données à sa guise : pour une manifestation, nous avions fixé un haut-parleur qui hurlait les résultats, pour une autre, un téléscripteur qui les crachait comme un sismographe… Nous ne sommes pas dans une machinisation des humains mais dans un outillage de l’homme par la machine. Il ne s’agit pas d’un objet mais d’une expertise embarquée qui vise à donner à chaque citoyen une capacité d’empowerment) politique grâce à l’Internet des objets.

Bottom-up

Dans la perspective d’un déploiement plus large, l’ingénieur de la bande a déjà prévu de permettre aux capteurs de communiquer entre eux, “qu’ils puissent s’étalonner, prévenir d’une panne, relayer une batterie faible…” énumère Gabriel Dulac.

Pour assurer l’accessibilité des capteurs aux associations, le coût reste une contrainte-clé et justifie, à lui seul, le recours au do-it-yourself : un seul boîtier AirParif, produit de qualité industrielle, est facturé 10 000 euros. Aux yeux de Sébastien Vray, président de l’association Respire, le potentiel d’empowerment est considérable :

Aujourd’hui, les associations de surveillance de la qualité de l’air (Asca) produisent des données fiables mais sur des échantillons très étroits : une batterie de station de fond, éloignée du trafic, et des batteries de proximité, plongées dans la circulation. Avec les capteurs citoyens, la possibilité serait offerte de produire une véritable information bottom-up sur la qualité de l’air : placer des capteurs dans des poussettes, simuler des trajets ou, tout simplement, mettre des capteurs chez les “pauvres” pour pouvoir établir le lien entre précarité sociale et précarité environnementale.

L’OMS évalue à deux millions par an le nombre de décès prématurés liés à la dégradation de la qualité de l’air (30 000 en France) . Avec les capteurs bon marché, Respire espère donner aux associations de défense du cadre de vie les moyens d’argumenter sur les nuisances liées à la pollution de l’air. Pour héberger les premières données, Sébastien Vray vient d’inaugurer PollutionDeLAir.info, une des premières extensions du projet Capteurs citoyens qui lance ses sondes en direction d’autres défis offerts par les données environnementales : pollution sonore, pollution visuelle et qualité de l’eau.


“Citoyens capteurs”Photo CC [bync] Pierre Metivier. L’autre photo (sur fond vert) est issue du wiki mentionné dans l’article.
Photo de une de Pierre Métivier, éditée par Owni.

]]>
http://owni.fr/2012/11/26/mesure-ta-pollution/feed/ 17
Le CAC40 entre dans les “fab labs” http://owni.fr/2011/09/26/les-fab-labs-capitalisent/ http://owni.fr/2011/09/26/les-fab-labs-capitalisent/#comments Mon, 26 Sep 2011 13:56:21 +0000 Sabine Blanc http://owni.fr/?p=80356

Robots du hackerspace de Toulouse (cc) Ophelia Noor

Les industriels des télécoms, de l’énergie et de la grande distribution lorgnent du côté des fab lab (fabrication laboratory), c’est-à-dire un lieu citoyen ou universitaire, non lucratif, dédié aux fabrications d’objets à la demande. Cet été, Orange a montré les premiers résultats de Thinging, un fab lab expérimental autour de l’internet des objets. EDP, l’équivalent portugais d’EDF, a fait de même l’année dernière, le groupe Adeo, propriétaire de Leroy-Merlin, s’y intéresse de près. Ces mini-usines constituées de machines-outils assistées par ordinateur (imprimante 3D, découpeuse-laser, fraiseuse, etc) sont nées au début des années 2000 au MIT sous l’impulsion de Neil Gershenfeld, et essaiment depuis dans le monde entier [en].

Jusqu’à présent, hormis les particuliers, ce sont surtout de petites structures souples qui sont allées sur ce terrain, artisans et designers. « Nous avions plusieurs fabricants de meubles au lab, explique Joris, de Protospace [nl], en Hollande, l’un d’eux a même programmé pour faire un placard customisé, deux autres avaient déjà leur machine à fraiser CNC, sans l’expérience au lab, ils n’y auraient jamais pensé. Il y a l’initiative de Waag fablab et le label Droof design, ils ont présenté au Salon du mobile de Milan leur concept de design numérique, Design for download. Droog a demandé à quelques designers de dessiner quelque chose qui peut être fabriqué dans différentes structures, par exemple les fab labs. »

Autant de projets dont l’inscription dans la philosophie des fab labs, définie par une charte, semble assez naturelle : ouverture, partage, éducation, et donc logiciels open source, publication sous licence Creative Commons, etc. Pourtant si les grosses sociétés en sont a priori à mille lieux, les deux univers ne sont pas incompatibles. Sur le chapitre argent, la charte est en effet assez floue :

Business : des activités commerciales peuvent être initiées dans les fab labs, mais elles ne doivent pas faire obstacle à l’accès ouvert. Elles doivent se développer au-delà du lab plutôt qu’en son sein et bénéficier à leur tour aux inventeurs, aux labs et aux réseaux qui ont contribué à leur succès.

De même, la protection des inventions est autorisée :

Secret : les concepts et les processus développés dans les fab labs doivent demeurer utilisables à titre individuel. En revanche, vous pouvez les protéger de la manière que vous choisirez.
Le code de notation, qui classe les fab labs en fonction de leur degré de respect de la charte, en dit long sur les abus de nom ! Même un fab lab noté A offre « au moins un accès libre/ouvert au public (mais peut faire payer les coûts réels du matériel) ». Traduction : l’accès peut parfois être fermé au public, par exemple pour le louer à une entreprise, ou restreint à un type de public.

De quoi favoriser « des dissensions philosophiques au sein même de la communauté, explique Fabien Eychenne, de la Fondation Internet nouvelle génération (Fing). En Norvège [en], ils sont assez stricts par exemple alors qu’à Manchester [en], ils sont plus ouverts. » La raison est pragmatique, explique-t-il : cela permet de financer la structure, dont le coût s’élève à quelques milliers d’euros minimum, jusqu’à plusieurs dizaines de milliers d’euros. Dans un contexte de baisse des subventions publiques, « privatiser » l’accès moyennant finances fait partie des solutions.

« Nous gérons le fab lab sans subventions, comme la plupart des autres, explique Jaap Vermas, de FabLab Truck [en], qui, comme son nom l’indique, emporte tout le matériel dans un (gros) camion. Mais nous choisissons aussi de faire des événements gratuits. Nous sommes parfois payés par les écoles où nous faisons des workshops. Cela fait partie de la philosophie de proposer l’usage gratuit pour de courtes durées, le temps de faire un prototype, et de faire payer pour les utilisations longues. Nous avons aussi comme clients des sociétés qui investissent dans des projets non-profits, pour compliquer encore les choses… Par exemple, en Ecosse, une entreprise dans les technologies de l’information a payé notre visite, mais elle nous a demandé de faire des ateliers dans les écoles. Je pense qu’ils investissent dans un fab lab à Troon, en cours de démarrage [en], car ils pensent que c’est bon pour la compagnie d’être en relation avec. Mais ils n’ont pas d’intérêt direct à l’utiliser, à mon avis. » Il conclut dans un sourire :

Le non-profit n’existe pas. Tout le monde doit manger de temps en temps…

Quand fab lab pas content, lui toujours faire ainsi (dragon imprimé en 3D dans un fab lab au Japon).

Maintenir le territoire

Toutefois, le but principal n’est pas la rentabilité mais bien d’assurer la pérennité de la structure, contrairement à une entreprise commerciale. À ce titre, les marges de manœuvres ne sont pas légion. Le label fab lab du MIT n’a pas de valeur juridique : contrairement au logo AB, une entreprise ne peut pas se voir infliger une amende si elle ne respecte pas la charte, elle se verra retirer son logo, c’est tout.

Pourtant, les « fablabeurs » ne manifestent pas d’inquiétude outre-mesure. « En cas d’offensive de la grande distribution, les fab labs ne seront peut-être pas assez structurés pour résister, analyse Nicolas Lassabe, d’Artilect à Toulouse. Les fab labs ont intérêt à tisser des liens avec les institutions pour s’ancrer dans le paysage : universités, organismes publics. » Un retour dans la matrice protectrice somme toute puisque les fab labs ont été incubés à l’université. Et contrairement aux idées reçues, « l’université est plus ouverte qu’on ne le pense, témoigne Emmanuelle Roux, sa démarche de base, c’est la recherche, l’idée d’essayer, de tâtonner, pour trouver. » Elle témoigne en connaissance de cause puisqu’elle a obtenu en quelques mois avec son collègue Laurent Ricard l’accord de l’université de Cergy pour lancer FacLab. De même, les collectivités territoriales sont demandeuses : le fab lab, c’est du lien social et de la relocalisation à relativement peu de frais.

Nicolas Lassabe cite aussi l’exemple de Ponoko [en], un site où les gens, entre autres possibilités, fabriquent leur bien sur mesure avant de le recevoir par la poste : « son développement est un bon signe, il travaille avec des fab labs, ils sont ouverts, leur modèle économique est basé sur l’open source et le DIY. »

« Je pense que ces deux chemins peuvent coexister, explique Michael Weinberg, de Public Knowledge [en], un organisme de défense des droits des utilisateurs à l’ère du numérique, auteur d’un livre blanc sur l’impression 3D. Si je vais dans un Ikea et que je vois une imprimante 3D qui me permet de customiser une lampe achetée, cela peut me motiver à m’acheter une imprimante 3D, et je ne pense pas que cela détruirait le côté hacker de la communauté impression 3D. Le logiciel est utilisé par toutes sortes de personnes mais la communauté du logiciel open source est forte. »

Joris est plutôt optimiste : la rapidité de l’évolution technologique devrait permettre la multiplication des lieux. Ainsi, il arrive déjà à proposer son « un euro la minute de design » :

Si je peux déjà le faire maintenant, ce serait étrange si un magasin ne peut pas le faire dans quelques années. Par exemple, si votre aspirateur cesse de fonctionner, vous allez au magasin de pièces détachées (partshop, ndlr), ou DIY shop, il y a un ordinateur avec une imprimante 3D, vous tapez l’année et la marque de votre modèle et quelques heures après, vous avez votre pièce. Vous passez complètement à la trappe toute l’économie, la distribution, la logistique.

« J’aimerais voir des labs de petite taille partout »

« C’est bien si les fab labs deviennent le “business normal”, avance aussi Jaap. J’aimerais voir des labs de petite taille partout, comme il y avait des magasins d’impression avant que l’imprimante ne se généralise dans les foyers. Alors les fab labs comme les miens seraient moins nécessaires, mais seraient davantage comme un hackerspace. » Il va même plus loin : “Je pense que l’accès aux outils pour la communauté est le plus important. Si cela fonctionne sur un modèle commercial, il n’y a pas besoin des fab labs en tant que tels. D’un autre côté, ils ont aussi une fonction importante : c’est un espace de rencontre et de co-working que les structures commerciales n’auront peut-être pas. Mais je ne pense pas que cela doive être gratuit. La plupart des fab labs ont peu de temps pour un usage gratuit et uniquement pour les gens qui ont d’abord payé pour un cours d’initiation. C’est plus une question d’accès pour tous. La plupart du temps, si vous venez un jour dit “gratuit”, vous pouvez attendre longtemps avant d’avoir une machine. Ou vous devez réserver deux mois à l’avance.

L’écrivain anglais J. G. Ballard avait déjà imaginé l’issue de la question : des fab labs partout, aux mains de néo-artisans boostés à la haute technologie. C’était en 1976, dans la nouvelle L’Ultime cité :

En une génération, ils avaient réussi, comme d’innombrables communautés du même type établies autour des grandes cités, à construire leur paradis pastoral, mariage forcé d’Arcadie et d’une technologie perfectionnée. [...] À Garden city, les magasins étaient rares : tout ce dont on pouvait avoir besoin […] était commandé directement à l’artisan qui le dessinait et le fabriquait selon les exigences précises du client. À Garden City, tout était si bien fabriqué qu’il durait éternellement.

Photos CC Flickr  Paternité Atsushi Tadokoro

Robots du hackerspace de Toulouse par Ophelia Noor PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales pour Owni

Image de Une Loguy pour OWNI, téléchargez le poster.

À lire aussi : Leroy-Merlin se paye les labos citoyens ; Imprimer le réel à portée de main

Rendez-vous : FabLab Toulouse Conference du 20 au 23 octobre prochain.

]]>
http://owni.fr/2011/09/26/les-fab-labs-capitalisent/feed/ 12
Augmentons nos démocraties de quelques lignes de code http://owni.fr/2010/12/04/wikileaks-augmentons-nos-democraties-de-quelques-lignes-de-code/ http://owni.fr/2010/12/04/wikileaks-augmentons-nos-democraties-de-quelques-lignes-de-code/#comments Sat, 04 Dec 2010 15:17:47 +0000 Nicolas Voisin http://owni.fr/?p=38024

Permettez-moi de douter, peut-être, de l’impact des révélations de WikiLeaks sur la diplomatie internationale ou l’art de la guerre, mais en rien des conséquences pour l’écosystème de l’information et l’économie des médias.

Olivier Tesquet compare l’impact de WikiLeaks pour la presse à celui qu’a eu Napster pour l’industrie de la musique . “Après, rien ne fut plus pareil” caricature, mais sans réellement s’y tromper, son fondateur dans The Social Network. Nous qui défendons l’idée d’un journalisme augmenté du travail en réseau et de l’apport des technologies, notamment pour l’investigation et l’analyse de documents, n’allons pas nous en plaindre.

Ce n’est pas une démarche de transparence qu’initie Julian Assange et ses proches mais un chemin vers plus de profondeur et de granularité, vers une information démontrée, davantage étayée, vers un journalisme d’expertise et de médiation.


Il faudra sans doute bien du temps et du recul pour saisir comment et pourquoi les instances internationales et les penseurs et diplomates, (dont certains nous avaient habitué à plus de clairvoyance), claironnent depuis bientôt une semaine que la démarche de Wikileaks serait pétrie d’anarchisme, quand elle tend à renforcer par la correction le modèle capitaliste. On parle même de totalitarisme, alors qu’à chaque instant l’organisation démontre sa volonté d’associer le plus grand nombre, professionnels comme citoyens, à son travail de libération des faits.

Car Wikileaks n’est pas plus l’incarnation d’un projet politique (c’est tout au contraire une promesse de réalisme) que le rêve d’opendata et de libération de “données” de geeks ayant pour religion l’open source et pour écriture sacrée la ligne de code. Assange, avec qui Nicolas Kayser-Bril et Pierre Romera ont passé du temps, n’est ni un fou ni un prophète : c’est un risque-tout effectivement visionnaire mais bien plus raisonné et raisonnable que la quasi-totalité de nos confrères a bien voulu le dire.

Dans ce moment d’emballement de l’agenda médiatique et de poussées contre-réactionnaires où les démocraties appellent à la censure (la France en tête !) il n’est qu’une chose qui tiennent de l’urgence : se poser, se taire peut-être. Et réfléchir ensemble à ce qui se joue réellement devant nos yeux. Et cela fait sens :

Nous ne vivons pas seulement une crise mais une opportunité sans précédent, celle d’augmenter nos démocraties des valeurs et outils apportées par l’ère des réseaux technologiques. En toute logique, l’information est la première touchée.

C’est toute une tectonique des plaques qui se met en mouvement. En impactant durablement l’écosystème médiatique et la circulation de l’information, WikiLeaks pourrait bien enrichir nos démocraties, par rebond, de quelques lignes de codes. Il serait temps.

> Image de clef (Marianne) retouchée d’après CC Alain Bachelier / StateLogs by Loguy.

Retrouvez tous nos articles sur WikiLeaks


]]>
http://owni.fr/2010/12/04/wikileaks-augmentons-nos-democraties-de-quelques-lignes-de-code/feed/ 4
Vendredi c’est Graphism ! S01E09 http://owni.fr/2010/10/08/vendredi-c%e2%80%99est-graphism-s01e09/ http://owni.fr/2010/10/08/vendredi-c%e2%80%99est-graphism-s01e09/#comments Fri, 08 Oct 2010 09:00:00 +0000 Geoffrey Dorne http://owni.fr/?p=30749 Un grand bonjour graphique à toutes et tous,

Une belle actualité graphique cette semaine dans Vendredi c’est Graphism! avec beaucoup de sujets assez divers ! Si ça vous tente, on parlera aujourd’hui Open Source & Design, on fera également un point sur le nouveau logo de GAP & le dernier showreel de Genki Ito (assez bluffant!). On enchainera ensuite avec le travail pixel & jeu vidéo de Jonathan Ball, puis je vous inviterai à regarder un projet de design du CIID. Pour finir, on va relativiser sur “la couleur” dans le design et un bon WTF bourré d’insultes québécoises ;-)

Voici une réflexion menée entre mon ami Avétis & moi-même sur les questions d’opensource & de design. En effet, l’idéologie opensource est très présente dans certaines sphères du web, de développeurs, etc. mais encore assez rare chez les designers, voire quasi inexistante. Pourtant, les outils (pas forcément les outils de création, mais tous les autres) que nous utilisons sont nombreux a être sous licence opensource.


photo

Quelques questions :

1 – Serait-il possible d’imaginer, pour faire face aux efforts des développeurs qui travaillent sur des projets opensource, que tous les designers qui utilisent des applications opensource puissent aider un projet opensource — pas obligatoirement un qu’ils utilisent — à se faire une beauté, une identité visuelle, une affiche, à communiquer sur leur existence. On le sait, les applications opensource manquent souvent d’une bonne interface, d’un bon logo, d’une bonne touche graphique et cette forme de donation pourrait apporter un bien fou à la communauté opensource. On pourrait même imaginer un petit portail web à cet effet.

2 – Au-delà de ce côté participatif, la diffusion avec les sources des travaux des designers serait également un gros plus pour les projets opensource. On sait très bien que dans le milieu professionnel, les sources ont une valeur financière, qu’il est possible de les vendre. Ici, avec l’opensource, à l’instar des logiciels, les designers laisseraient leurs sources à dispositions.

3 - Selon-vous, quelle licence creative commons correspondrait le mieux à cette forme d’échange de bons procédés ?

4 – Si des sources graphiques sont diffusées avec un projet opensource, il serait intéressant qu’elles le soient dans un format libre et ouvert. il arrive très souvent qu’un logo soit partagé par son créateur dans le format AI (ou pdf) propriétaire. (remarque ajoutée par lolobobo en commentaire)

Voilà, le terrain est en friche, je vous invite à y réfléchir également et pourquoi pas, proposer vos propres idées !

source

Dans l’actualité design & graphisme de la semaine, voici un petit évènement qui a fait beaucoup de bruit chez les designers & de nombreux curieux. Il s’agit du nouveau logo de GAP qui a pris un virage à 180 degrés.

Fondée en 1969 à San Francisco, Gap est l’une des marques les plus populaires de prêt à porter aux États-Unis. Avec 1140 magasins en Amérique et près de 300 autres à l’étranger, Gap possède une visibilité très large et une bonne image auprès de son public. Mais voilà, Gap a lancé très discrètement son nouveau logo avant-hier. Au début, j’ai cru à un “fake” comme l’on dit, mais non, c’est bel et bien le nouveau logo.

Avec la Helvetica pour typographie, zéro prise de risque, on se retrouve avec un logo tout à fait standardisé. Le petit carré ombré dans le coin n’aide pas non plus le logo en lui apportant un côté presque bas de gamme. Pour encore un peu plus de fun, un compte Twitter a même surgi 24 heures après la sortie du logo. Et le pire c’est que GAP est resté muet et qu’aucun communiqué de presse officiel a expliqué le travail sur ce logo.

source & source

On enchaine avec la sortie cette semaine du showreel (vidéo de présentation) du talentueux designer Genki Ito. Ce jeune homme a rejoint W + K Tokyo Lab en 2004 et a travaillé depuis sur des projets aux grands noms tels que Google, Nike ou encore PlayStation. Il a également reçu plusieurs prix de design… mérités !

Cliquer ici pour voir la vidéo.

source

On s’éloigne du design de quelques pas pour jeter un œil du côté de l’illustration et notamment avec ces mondes inspirés de l’univers 8-bit et celui du jeu vidéo. Réalisées par l’illustrateur et designer anglais Jonathan Ball, ces créations sont pleines de couleurs de joie et de détails. L’idée globale que l’auteur présente est que les jeux 8-bit peuvent gouverner le monde, tout simplement ;-)

source

Voici ensuite un projet assez intéressant intitulé LSSE pour Locate, Support, Survive, Endure. Ce projet, réalisé par Ishac Bertran (étudiant en design au Copenhagen Institute of Interaction) est prévu pour relier des survivants, les secouristes et les bénévoles en cas de catastrophe de grande envergure. Le tout fonctionne avec de la visioconférence et de la cartographie. Les informations sont envoyées à un tableau de bord central, sur lequel les responsables des secours gèrent tous les aspects logistiques.

Ce réseau est donc utilisé à différents niveaux :

  • pour le choix matériel emporté par les secouristes
  • pour garder un certain calme au sein des survivants
  • pour communiquer avec sa famille

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

source

On continue le tour de la semaine avec cette belle image que Jacinthe Busson, designer & ergonome a bloggué cette semaine. Il s’agit là d’un topo sur les liens entre la couleur, son aspect et ses répercutions sonnantes et trébuchantes sur le commerce. Loin de poser un dogme sur la signification des couleurs, cette grande visualisation nous rappelle quand même des éléments fondamentaux.

Jacinthe en extrait quelques chiffres :

  • 52% des clients ne reviennent pas sur un site web à cause de son esthétique.
  • 42% des consommateurs fondent leur opinion sur la conception globale d’un site web.
  • 60% des consommateurs se sentent à l’aise et sont plus susceptible d’acheter un produit qui a le mot «garantie» qui lui est associée.

source

On termine la semaine avec du bon WTF québécois comme on les aime !  Réalisés par le Tampographe Sardon, ces tampons sont une superbe collection des insultes québécoises les plus drôles, prenantes et les plus vulgaires ! Mais pourquoi est-il si méchant ? ;-)

source

Un petit mot de la fin sous forme d’image ;-)

http://avetisk.mun-corp.org/
]]>
http://owni.fr/2010/10/08/vendredi-c%e2%80%99est-graphism-s01e09/feed/ 4
Internet à la croisée des chemins http://owni.fr/2010/04/28/internet-a-la-croisee-des-chemins/ http://owni.fr/2010/04/28/internet-a-la-croisee-des-chemins/#comments Wed, 28 Apr 2010 15:31:41 +0000 Philippe Quéau http://owni.fr/?p=13896 Titre original :

Cendres et gemmes

Google vient de créer un site qui pousse un peu plus loin que d’habitude, bien qu’encore fort modestement, le principe que les gardiens ont besoin d’être eux-mêmes « gardés », ou à tout le moins « regardés ».

En effet, sur http://www.google.com/governmentrequests/, on peut observer l’activité offensive des États et comparer le nombre et la nature de leurs requêtes interventionnistes vis-à-vis de Google et de ses utilisateurs.

Ces demandes des États concernent notamment l’interdiction de blogs, le bannissement de certains mots clés dans les recherches via Google, ou encore la suppression de l’accès à des vidéos présentées par YouTube.

Certains pays sont très actifs, et d’autres beaucoup moins. D’autres encore se sont totalement abstenus de la moindre intervention (ils ont peut-être d’autres façons de faire).

And the winner is… Brazil! Suivi de l’Allemagne, puis de l’Inde et des États-Unis. Ensuite viennent la Corée du Sud, le Royaume Uni et l’Italie.

L’outil est certes encore un peu sommaire, mais l’idée elle-même mérite qu’on s’y arrête. Elle montre fort bien comment la Toile et les applications qu’elle rend possibles, pourraient davantage être mises à contribution pour exposer les pratiques officielles ou officieuses, dévoiler les tendances à l’œuvre des politiques, et en finir avec un voile d’ignorance et d’hypocrisie.

Des progrès immenses restent certes à faire, mais enfin on peut rêver que la « chose publique » sera, par ce type de méthode, de plus en plus mise en évidence, et exposée en fait et en droit aux yeux du public mondial, pour sa considération et ses éventuelles réactions.

Dans un billet précédent (cf. Le WebCamGate), j’évoquais l’irrésistible marche de nos sociétés vers une « transparence » de plus en plus absolue, facilitée par la technologie, et implémentée de façon immanente dans les réseaux et les routeurs, appuyée par des « trap doors » de toutes sortes, et généralement par d’innombrables outils de dévastation de la vie privée (des WebCam piratables aux RFID).

Cette transparence totale, vers laquelle il semble que nous nous dirigions à marche forcée, s’accroît sans cesse tous les jours, sans réaction notable des foules, trop contentes de bénéficier de certains avantages secondaires pour se préoccuper de questions philosophiques telles que la question de l’identité, ou celle de la privatisation de l’intérêt public.

Mais il est piquant de voir à travers l’exemple dewww.google.com/governmentrequests, combien la « transparence » imposée au plus grand nombre pourrait en fait se retourner brutalement contre le « système », si l’on prend cette expression dans une acception extrêmement englobante, couvrant un consensus plus ou moins général, que l’on peut qualifier, pour simplifier, de « société de l’information ».

La dynamique qui s’est enclenchée avec la mondialisation en réseau, offre plusieurs logiques en compétition active pour prendre le dessus. Il y a la logique capitalistique, ou la sécuritaire par exemple, mais aussi la collaborative, l’ouverte et la libre. De l’écosystème complexe qui contient toutes ces tendances contradictoires, que sortira-t-il? Quelque chose d’aussi imprévisible, à mon avis, que le nuage de cendres volcaniques qui a paralysé le ciel européen ces derniers jours.

Ce qui fut le plus surprenant, en effet, ce n’est pas qu’un volcan ait pu se manifester à sa manière, mais c’est à quel point une société de plus en plus obsédée par la sécurité, et notamment dans le domaine du transport aérien, a pu montrer un tel état d’impréparation et même d’ignorance absolue.

Pour continuer la métaphore, la Toile est un volcan qui commence à peine à se réveiller. Nul ne sait si de ses cendres ou de ses laves futures, c’est la fin d’un monde qu’il faut attendre, comme jadis Pompéi succomba, ou bien au contraire de riches territoires à la terre grasse, noire et prolifique, et parsemées de diamants, d’améthystes et autres gemmes.

Billet initialement publié sur Metaxu

Photo CC by i_yudai

]]>
http://owni.fr/2010/04/28/internet-a-la-croisee-des-chemins/feed/ 1
9 prévisions open source pour l’année 2010 http://owni.fr/2010/02/11/9-previsions-open-source-pour-lannee-2010/ http://owni.fr/2010/02/11/9-previsions-open-source-pour-lannee-2010/#comments Thu, 11 Feb 2010 15:54:22 +0000 aKa (Framasoft) http://owni.fr/?p=8009 Que va-t-il se passer en 2010 dans le monde de l’open source et du logiciel libre ?

Seul Nostradamux le sait.

Mais le journaliste Bruce Byfield s’est tout de même risqué au jeu des prédictions dans un article que nous avons traduit avec un petit mois de retard (ouf, il était temps !).

Tout comme nous, vous ne serez pas forcément d’accord sur tout. Il va alors sans dire que les commentaires sont là pour accueillir vos critiques et vos propres plans sur la comète[1].

L’open source en 2010 : Neuf prédictions

Open Source in 2010: Nine Predictions

Bruce Byfield – 30 décembre 2009 – Datamation
(Traduction Framalang : Cheval boiteux, Martin et Olivier)

Même si c’est la fin de la décennie seulement pour ceux qui ne savent pas compter, les rétrospectives semblent plus à la mode que les prédictions en ces derniers jours de 2009. Peut-être aussi qu’après une année de récession, les experts de l’avenir deviennent plus prudents.

Mais, n’étant pas de ceux qui suivent les tendances et n’étant pas du genre nostalgique, je préfère tourner mon regard vers le futur, pour envisager ce qu’il pourrait réserver aux logiciels open source. Tout bouge dix fois plus vite dans l’open source que dans l’informatique grand public, et 2010 risque bien de ne pas déroger à la règle.

Je pense que nous pouvons considérer comme acquis que l’open source va continuer à gagner en popularité. 2010 ne sera pas cette légendaire « Année où Linux se démocratise », mais nous devrions continuer à observer la même lente et constante progression de son adoption que dans la dernière décennie.

Mais quoi d’autre ? Permettez-moi de prouver ma témérité en faisant neuf prédictions sur ce que 2010 nous réserve sur le plan des communautés, de la technologie et de l’économie de l’open source.

1. L’arrivée des pilotes vidéos totalement libres

Les utilisateurs ont dû attendre longtemps pour avoir des pilotes vidéo open source aussi performant que leurs pendants propriétaires. Mais d’ici à la fin de l’année prochaine cela pourrait bien se concrétiser. Les pilotes Intel sont déjà stables, et utilisés sur plus de 25% des ordinateurs open source.

Quant aux autres cartes graphiques, le noyau 2.6.33 de Linux devrait apporter une meilleure gestion des cartes ATI et NVIDIA. Attendez-vous donc à de gros progrès d’ici à la fin de l’année. Et dans le pire des cas, si des fonctions manquent encore, elles devraient être au point pour la mi-2011[2].

2. La communauté crééra un fork de MySQL

Quand Oracle a racheté Sun Microsystems en avril 2009, ils ont également acquis MySQL, la base de données la plus populaire d’Internet. Huit mois plus tard, le sort réservé par Oracle à MySQL est toujours incertain et les gens s’inquiètent.

Richard Stallman a demandé publiquement à Oracle de rendre MySQL à la communauté, alors que Monty Widenius, le créateur de MySQL, a initié une campagne de rédaction de lettres à la Commission européenne pour éviter le démembrement de la base de données par Oracle.

Étant donné qu’il semble n’y avoir aucune logique juridique pour aider ces campagnes, je pense qu’ils vont échouer. S’ils y arrivent, la méfiance envers Oracle aura certainement raison de l’intégration de MySQL dans les distributions open source.

Il y a de grandes chances que la communauté privilégie des forks existants de MySQL, probablement MariaDB de Widenius, qui est déjà intégrée au Launchpad d’Ubuntu. PostgreSQL, l’autre grande base de données open source, ne devrait pas tant en profiter car elle semble moins adaptée aux besoins des sites Web.

3. La sortie de Gnome 3.0 risque de déclencher une révolte chez les utilisateurs

Il y a deux ans, un vent de révolte accompagna la sortie de KDE 4.0, car cette nouvelle version instaurait une rupture avec les précédentes (des fonctions clés n’y étaient pas encore intégrées). GNOME 3.0, provisoirement prévu pour septembre 2010, ne devrait pas souffrir du même manque de fonctionnalités, mais les premières versions suggèrent un style nouveau, comme KDE 4.0 (et les premières réactions montrent que les utilisateurs y seront aussi hostiles).

L’avantage de GNOME est que ses développeurs peuvent bénéficier de l’expérience de KDE. Aucune hostilité n’est permanente, surtout si la prochaine version a une feuille de route claire.

Tout de même, les plaintes peuvent être spécialement fortes ou longues, qui sait ? Peut-être que les critiques envers GNOME attireront plus d’utilisateurs vers KDE ou vers des environnements graphiques moins connus comme Xfce.

4. La différence entre Logiciel Libre et Open Source va se creuser davantage

De l’extérieur, open source et logiciel libre sont des noms différents désignant le même phénomène. Cependant pour beaucoup de membres de communautés c’est comme dire que le Protestantisme n’est pas différent du Catholisisme. Malgré bon nombre de similarités l’open source est un mouvement de développeurs qui vise à perfectionner la qualité du code source, alors que le mouvement du logiciel libre se concentre sur les libertés accordées à l’utilisateur[3].

Dans la pratique, les deux philosophies coexistent (souvent à l’intérieur d’un même projet). Cependant, de temps à autre, ces membres rentrent en conflit. Le dernier conflit majeur était il y a deux ou trois ans à propos de la version 3.0 de la licence GNU GPL (GNU General Public License), qui donnait plus d’importance au logiciel libre que la version 2.0.

Le problème suivant qui provoquera un conflit reste incertaine. Cependant, les personnes soutenant le logiciel libre n’ont jamais été timides sur le fait d’exprimer leurs opinions, et les adhérents de l’open source sont devenus de plus en plus méprisants envers le logiciel libre en général et leur fondateur Richard Stallman en particulier. Dans la même veine, la rhétorique est devenue si méprisante que le conflit semble n’être qu’une question de temps.

Il y a deux ou trois semaines, le problème le plus probable apparaissait être le possible retrait de GNOME du projet orienté logiciel libre GNU, un changement qui ne signifierait presque rien dans la pratique, mais qui serait probablement perçu comme une preuve que GNOME est désormais clairement dans le camp de l’open source. Le problème, cependant, est plus complexe que la contestation du conflit lui-même.

5. L’open source sera encore confronté au sexisme

2009 nous a montré une série d’évènement dans lesquels des gens comme Richard Stallman[4]et Mark Shuttleworth ont été accusés de sexisme à cause de remarques faites en public.

Et avec l’observation que les femmes sont sous-représentées dans l’open source, 2009 a été l’année où la communauté a semblé découvrir cette problématique[5].

6. Google Chrome OS inaugurera les OS dans les nuages

Chrome OS, le système d’exploitation dans les nuages de Google, devrait sortir dans la deuxième moitié de 2010. Étant donné ce que l’on dit toujours sur l’état des version bêta des produits de Google, personne ne sera surpris que version finale soit retardée. Mais 2010 montrera, au moins, une version bêta avancée ou une release candidate. Malgré l’existence deJolicloud, la majorité des utilisateurs verra Chrome OS comme le premier système d’exploitation dans les nuages.

Chrome OS devrait être téléchargé des millions de fois dans le premier mois de sa sortie, du fait de sa nouveauté. De plus, Google est en train de travailler avec les fabricants de matériel pour être sûr que Chrome OS sera supporté. Malgré tout, une grande partie des utilisateurs resteront sceptiques à l’égard de Chrome OS. Beaucoup d’entre-eux ont déjà de sérieux doutes sur les systèmes d’exploitations dans les nuages, et jusqu’à présent ils y sont moins à l’aise que sur les systèmes d’exploitations traditionnels, desquels ils sont censés être ainsi délivrés.

Je pense et j’espère que Chrome OS ne sera rien de plus qu’un produit de niche. De toutes les façons, on aura quand même le verdict sur la validité du concept avant la fin de 2010.

7. Mozilla Firefox et Google Chrome se disputeront la première place

Même si je ne me trompe pas en affirmant que Chrome OS ne suscitera que peu d’engouement, ce qu’il restera après sa disparition c’est bien le navigateur Chrome. Sa vitesse et son aspect multitâches sont des défis que devra relever Mozilla Firefox avec habileté pour lui faire face, d’autant plus que Chrome pourrait signifier une interruption du soutien de Google dans le développement de Mozilla.

Pour le moment, le plus grand avantage de Firefox réside dans ses milliers d’extensions. Bien que les premières extensions pour Chrome soient d’ores et déjà disponibles, elles ne battront pas celles de Mozilla en nombre ou en polyvalence avant quelques années (et ceci seulement s’il se forme une large communauté).

Cette situation veut dire que Chrome n’est pas plus prêt à dépasser Mozilla que Mozilla est prêt à dépasser Internet Explorer dans les prévisions futures. Cependant, en 2010, Chrome peut ronger la base des utilisateurs de Firefox sur le même principe que Firefox le fait avec ceux d’Internet Explorer.

8. Raindrop et Wave ne vont pas réussir à trouver des utilisateurs

Par coïncidence, deux des nouvelles applications que nous trouvons prometteuses pour 2010 sont Mozilla Raindrop, un outil de réseau social et de messagerie électronique one-stop[6], etGoogle Wave, un outil collaboratif.

Les deux sont intéressants pour les développeurs et les ergonomes. Cependant, à l’heure où j’écris ces lignes, Raindrop n’est pas encore sorti, et Wave est seulement accessible sur invitations. Je serais surpris que l’un ou l’autre devienne un grand succès. Il s’agit en effet de résoudre des problèmes que les utilisateurs ne voient pas comme tels. Je n’ai simplement pas l’impression que les utilisateurs souhaitent centraliser leur messagerie, ou soient particulièrement intéresses par une collaboration en temps-réel.

Même si les utilisateurs se montrent motivés, Raindrop et Wave sont tous les deux en l’état trop compliqués et spécialisés en l’état pour qu’ils soient réellement adoptés. Un réajustement est nécessaire. Les critiques seront probablement enthousiastes, parce qu’ils font partie des utilisateurs expérimentés. Et les autres utilisateurs ? Pas tellement.

9. Le Nexus One ne sera qu’un jouet pour les geeks

Dans le courant du mois de janvier, le Nexus One de Google va être disponible[7]. Le Nexus One a fait un gros (bien que pas totalement favorable) buzz à l’intérieur de la communauté des techniciens, mais on peut se demander se faire une place.

D’après des rapports, le Nexus One n’inclura pas de fonctionnalités qui aurait pu lui attirer les faveurs du grand public. En plus, il va entrer sur le marché des téléphones mobiles déjà saturé, et Google ne possède pas la réputation d’Apple. Sans compter qu’il sera d’autant moins aidé que, au début, il ne sera pas vendu par les opérateurs de téléphonie mobile, et ne sera pas non plus dans les boutiques. En ces circonstances, je pense que il se vendra principalement aux développeurs, et qu’il peinera à élargir ce cercle[8].

Avec un peu de recul

Cette liste a été établie en toute indépendance. Pourtant, en la relisant, je réalise que quatre des neuf prédictions impliquent Google. Cette observation suggère une meta-prédiction : 2010 sera une année cruciale pour Google. Son évolution de développeur en acteur majeur aussi bien dans le logiciel que dans le matériel se joue cette année.

Connaissant l’histoire de Google, le succès de cette entreprise me laisse pessimiste. Et pourtant, Google lance tellement d’innovations que tôt ou tard, elle est susceptible de sortir quelque chose d’incroyable, la démonstration du paradoxe du singe savant peut-être tout simplement[9].

Pour ce qui est de mes autres prédictions, même si je m’attends à des changements dans la communauté open source, je ne me prépare pas à l’Apocalypse. La communauté est vaste, les changements sont inéluctables, mais en même temps, cela n’aura pas forcément beaucoup d’impact sur les milliers de personnes qui envoient des correctifs quotidiennement. Sur le coup, les sentiments sont exacerbés, mais en fin de compte, la communauté poursuivra tranquillement sa route, même si de temps en temps le cours des choses sera perturbé par un événement imprévisible.

Et si jamais je me trompe ? Alors j’en appelle aux privilèges des voyantes et demanderait qu’il ne me soit pas tenu rigueur de mon manque de précision ou de mon incapacité à prévoir le futur et je me réserve le droit de retenter ma chance l’an prochain, sans que personne ne me rappelle à mes erreurs passées.

Notes

[1] Crédit photo : Sergis Blog (Creative Commons By)

[2] NDLR : À propos de vidéo, Byfield a rédigé son article avant la nouvelle guerre des formats du Web.

[3] NDLR : Pour mieux comprendre la nuance, il y a un livre intéressant sur le sujet :-)

[4] NDLR : Byfield a consacré un article entier à ce sujet : Richard Stallman, Leadership, and Sexism.

[5] NDLR : Voir aussi ces deux articles du Framablog : Les femmes et le logiciel libre et Le code issu de Venus est-il meilleur que celui de Mars ?

[6] NDLR : Voir aussi l’article de Tristan Nitot : Thunderbird et Raindrop.

[7] Le Nexus One est déjà disponible, puisque nous publions cette traduction avec un mois de retard. On remarquera qu’il a les faveurs de Linus Torvalds

[8] NDLR : Le Nexus One ne sera peut-être pas un succès, mais il semblerait bien par contre qu’Android devienne lui un sérieux concurrent open source à Apple.

[9] NDLR : Le paradoxe du singe savant stipule qu’avec suffisamment de temps, un chimpanzé qui tape au hasard sur le clavier d’une machine à écrire pourra presque sûrement produire une copie intégrale d’une pièce de théâtre de Shakespeare.

» Article initialement publié sur Framablog

]]>
http://owni.fr/2010/02/11/9-previsions-open-source-pour-lannee-2010/feed/ 5
Edition numérique : la tentation de l’open source http://owni.fr/2009/08/28/edition-numerique-la-tentation-de-l%e2%80%99open-source/ http://owni.fr/2009/08/28/edition-numerique-la-tentation-de-l%e2%80%99open-source/#comments Fri, 28 Aug 2009 10:41:55 +0000 Admin http://owni.fr/?p=2879 Licence globale et open source offrent des modèles économiques éminemment intéressants pour le développement de propriété intellectuelle. Quoi de plus normal de les voir portés sur le devant de la scène comme modèles économiques potentiels pour l’édition de livres numériques.

La licence globale est un concept simple et particulièrement attractif. Tous les auteurs sont rémunérés sur un prélèvement direct sur les recettes des diffuseurs et des opérateurs. Le système est juste puisqu’il dit clairement une réalité souvent occultée : le contenu détermine la qualité du service. Mieux, le contenu est la seule qualité du service. Sans contenu, le service devient donc inutile. Il est logique d’attribuer une part des bénéfices du service à ceux et celles qui ont produit le contenu. C’est théoriquement le système adopté par des organismes de gestion de droits comme la SACEM. En pratique, les dérives sont nombreuses et la licence globale a cela de pervers qu’elle bénéficie essentiellement aux entités juridiques mandatées et à la frange minoritaire des auteurs ayant la meilleure notoriété, amplifiant d’autant leur influence.

La suite sur Temps Futurs, le blog de Pierre-Alexandre Xavier

]]>
http://owni.fr/2009/08/28/edition-numerique-la-tentation-de-l%e2%80%99open-source/feed/ 0